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à force d’aimer

la pente abrupte du terrain sur le flanc du puy Chateix. Les racines des hêtres et des pins s’enchevêtrent entre des blocs de lave que creusent les filets limpides des sources. Les sentiers y sont parfois inondés par des cascatelles ou rendus impraticables par l’amoncellement des pierres.

M. Fortier ne s’étonnait donc guère de ne rencontrer personne. Il coupait au plus court, bondissant d’un rocher à l’autre, dévalant le long des déclivités les plus raides, mais s’arrêtant quelquefois pour voir glisser sur les grandes herbes, entre les fûts noirs des arbres, les rayons rouges du soleil couchant.

Et jamais encore il n’avait senti tout son être emporté vers Hélène d’un élan plus attendri. Lorsqu’il s’immobilisait pour rêver, il évoquait le gracieux visage, devenu si pâle depuis quelque temps ; et, quand il se lançait de nouveau dans une descente vertigineuse, il croyait voler vers elle.

Au moment où il rejoignait le sentier, brusquement il la rencontra.

Elle était seule, sans son fils. Et, comme elle demeurait toute saisie par cette soudaine apparition, elle avait un aspect un peu mystique et surnaturel, dans sa rigide attitude, les bras chargés de fleurs. Car, dépassant son épaule, une gerbe pourprée de digitales la cachait à demi de ses épis magnifiques.