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à force d’aimer

métal, et divers autres trésors propres à exciter la curiosité de ses petites voisines ; puis il examina successivement tous ces objets avec une attention en apparence des plus profondes, espérant toujours que cet étalage tentateur et cette mimique suggestive attireraient l’une au moins des deux fillettes. De temps à autre, il levait sournoisement les yeux, et les apercevait en face de lui, collées à la jupe de Fräùlein, — qui lisait toujours, — et ne le perdant pas du regard.

Tout à coup, une dame, qu’il n’avait pas vue s’avancer le long de l’allée, s’arrêta devant la gouvernante allemande et les deux petites filles. René, lançant un de ses furtifs coups d’œil, s’étonna de cette silhouette qui lui cachait Huguette et Germaine. Mais la dame se baissa ; il entendit un bruit de baisers, puis le mot : « maman ». C’était donc la mère de Huguette… C’était la redoutable personne qui interdisait leurs jeux en commun. Il se sentit trembler comme un coupable. Puis, tout aussitôt, à la voir toute jeune, très jolie, d’une douceur blonde, cette belle dame vêtue comme une fée sous son parasol de dentelles, René sentit son cœur se réchauffer, s’épanouir, tandis qu’une bouffée de hardiesse lui montait au cerveau. Il se leva, vint se planter au milieu de l’allée. Quand elle l’aurait aperçu, la maman de Huguette devinerait qu’il était un enfant bien élevé, avec qui on pouvait laisser jouer