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ces renseignements, un Tatare amena devant le khan une petite cavale blanche et se mit à faire certaines simagrées. Le khan se leva, prit un fouet à long manche et, se plaçant en face de la jument, lui allongea un coup de fouet sur le front. Mais debout, quel aspect il vous avait, le brigand ! On aurait dit une statue, tant il était majestueux ; l’œil ne pouvait se détacher de sa personne. En même temps il était facile de voir que le cheval n’avait pas de secret pour lui. Habitué depuis l’enfance à observer ces choses-là, je remarquai aussi que la jument elle-même se sentait en présence d’un connaisseur ; son attitude semblait dire : « Regarde-moi bien, vois comme je suis belle ! » L’imposant Tatare l’examina longuement, mais non à la manière de nos officiers qui, en pareil cas, ne cessent de tourner autour de l’animal : tant que dura son inspection, le khan ne quitta pas sa place ; tout à coup il lâcha son fouet et, en signe d’admiration, se baisa silencieusement les doigts ; puis il se rassit sur son tapis de