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son sabre traînait à terre à côté de lui, je marchai dessus, je le piétinai en disant :

— Vois : ta bravoure, je l’écrase sous mon pied !

Mais, bien que la force physique lui fît défaut, il n’avait pas froid aux yeux, ce petit officier. Voyant qu’il ne pouvait me reprendre son sabre, il dégrafa son ceinturon et s’élança sur moi les poings fermés… Bien entendu ; tout ce qu’il y gagna fut une solide raclée que je lui administrai ; néanmoins la noblesse et la fierté de son caractère me plurent : je ne prenais pas ses billets de banque et il ne voulait pas les ramasser.

Quand le combat eut cessé entre nous, je lui criai :

— Altesse, reprends donc ton argent, tu en auras besoin pour tes dépenses de voyage !

Que croyez-vous qu’il fit ? Au lieu de ramasser ses assignats, il courut droit à l’enfant et s’en empara, mais, naturellement, il venait à peine de la prendre par une main que je la saisissais par l’autre.