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tité de gens avaient déjà péri. Le comte lui-même me cria : « Attention, Golovan, doucement ! » Du reste, en pareil cas, je ne manquais pas d’adresse et, quoique les rênes des timoniers fussent tenues par le cocher, je ne laissais pas d’être pour mon père un auxiliaire fort utile. Les timoniers étaient vigoureux et pleins d’ardeur ; malheureusement il y avait parmi eux un drôle qui s’adonnait à l’astronomie ; dès que vous lui tiriez fortement la bride, il levait la tête en l’air et contemplait le diable sait quoi dans le ciel. Il n’y a pas pire dans un attelage que ces astronomes, et c’est au timon qu’ils sont le plus dangereux. Un cheval qui a cette habitude, le postillon doit toujours le surveiller, parce que l’astronome lui-même ne regarde pas où il met le pied et ne sait pas dans quel trou il peut tomber. Naturellement, je ne cessais d’avoir l’œil sur mon astronome et je secondais toujours mon père : le cheval que je montais et celui que je menais en main, je les plaçais de façon à ce que leur queue touchât la tête des timoniers et que le timon