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qui ait un péché mortel sur la conscience ? Dieu me pardonne ! comme il l’aurait belle maintenant de laver sa faute dans son sang !

« Pourquoi, pensai-je, attendre une meilleure occasion d’en finir avec la vie ? Que Dieu bénisse ma dernière heure ! » Alors, sortant des rangs, je me déshabillai, je récitai l’oraison dominicale, je saluai mes chefs et mes camarades en m’inclinant de tous côtés jusqu’à terre, et je dis mentalement : « Allons, Grouchka, ma sœur d’élection, reçois le sacrifice de mon sang, c’est pour toi que je l’offre ! » Après cela, je mis dans ma bouche l’extrémité d’une mince ficelle à l’autre bout de laquelle le câble était attaché, et je sautai dans la rivière.

L’eau était terriblement froide : je fus pris d’un frisson sous les aisselles, le souffle s’arrêta dans ma poitrine, des crampes saisirent mes jambes, mais je n’en continuai pas moins à nager…

Les balles des nôtres volaient au-dessus de ma tête, celles des Tatares tombaient dans