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fils et me remirent vingt-cinq roubles pour mes frais de voyage, promettant en outre de me venir en aide toute leur vie. Dès que j’eus reçu cet argent, je le donnai à un monastère pauvre afin qu’on y dît des messes pour le repos de l’âme de Grouchka. Ensuite je priai l’autorité de m’envoyer au Caucase où j’espérais trouver bientôt la mort en combattant pour la religion. On fit droit à ma demande et je passai plus de quinze ans au Caucase sans jamais révéler à personne mon véritable nom ; pour tout le monde j’étais Pierre Serdukoff, mais, le jour de la Saint-Jean, je priais le Précurseur d’intercéder pour moi auprès de Dieu. Moi-même j’avais presque fini par oublier mon ancien état civil et j’achevais de la sorte ma dernière année de service quand tout à coup, le jour même de la Saint-Jean, nous fûmes détachés à la poursuite d’une bande de Tatares qui, après une action fort meurtrière pour eux, battaient en retraite vers le Koï-Sou. Cette dénomination est commune à plusieurs rivières du Cau-