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du poids de deux livres, et dans l’autre un simple pot de terre contenant de la pâte liquide. J’enfourche donc ce cheval et les quatre valets d’écurie venus avec moi lui détournent la tête en le tirant par la bride chaque fois qu’il essaie de mordre l’un d’eux. Mais ce diable, s’apercevant que nous sommes conjurés contre lui, se met à hennir, à hurler ; la sueur ruisselle sur tout son corps, il tremble de colère et veut me dévorer. À cette vue, je dis aux palefreniers : « Ôtez-lui vite la bride, à ce coquin ! » Un tel ordre les stupéfie, ils n’en croient pas leurs oreilles et me regardent avec de grands yeux. « Qu’est-ce que vous attendez ? reprends-je, ne m’avez-vous pas entendu ? Ce que je vous ordonne, vous devez l’exécuter sur-le-champ ! » — « À quoi penses-tu, Ivan Sévérianitch ? répondent-ils (dans le monde on m’appelait Ivan Sévérianitch Flaguine) ; comment se peut-il que tu nous ordonnes de lui ôter la bride ? » À ces mots, je commençai à me fâcher, car je sentais le cheval se démener furieusement sous