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le marchand ; venez entendre nos chants ; il y a de belles voix.

Et il poussa devant lui les deux battants de la porte… Alors, messieurs, cédant à je ne sais quelle attraction, je franchis le seuil d’une pièce très vaste, mais basse, dont le plafond faisait poche et menaçait de s’effondrer. Malgré le lustre qui avait la prétention de l’éclairer, la chambre, remplie de fumée de tabac, était fort sombre. À travers cette atmosphère opaque je distinguai des gens, beaucoup de gens ; une jeune tsigane chantait devant eux, c’était elle que j’avais entendue dans le vestibule. Au moment où j’entrai, elle finissait son morceau ; sa voix s’arrêta sur une note d’une douceur extrême et, quand elle eut cessé de chanter, il se fit un grand silence… Mais, au bout d’un instant, ce fut comme une frénésie dans tout l’auditoire : chacun quittait brusquement sa place, criait, battait des mains. Pour moi, je m’étonnais de trouver là tant de gens, il me semblait les voir sortir de plus en plus nombreux des