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Et l’ombre s’étendant mura la solitude.
Que faire ? où s’arrêter dans l’invisible nuit ?
Faut-il encor poursuivre et ramer dans ces mondes
Où s’élargit errant le vide aux froides ondes.
Sans limite, sans but, sans parole et sans bruit !
Allons ! il faut descendre et ressaisir la terre
Où se meut l’existence, où parle la lumière !
Mais, désespoir terrible aux pauvres passagers !
Pendant que leur esprit voit poindre les dangers,
Par un péril nouveau démentant leur prudence,
Effroyable ennemi, la tempête s’avance !
Des abîmes du ciel à ses souffles ouverts
Elle marche, bondit, et roule les nuages
Devant ses mille voix et ses clameurs sauvages
L’un par l’autre heurtés ou fuyant dans les airs.
Comme sur l’Océan souverain redoutable,
Les vents, voilà leur maître et leur maître indomptable,
 Roi de l’orage et des terreurs
 Qu’en tremblant écoute le monde.
Tandis qu’au fond des cieux, dans sa splendeur profonde,
L’astre aux calmes regards sourit de ses fureurs !

Mais tout pouvoir mortel, hélas ! n’est qu’impuissance !
Quel sera ton soutien, ton recours, ta défense,
Pauvre chef-d’œuvre humain ?…
Le jeune embarquement
Suit des vents furieux le brusque mouvement,
Comme au gré du hazard roule la branche morte
Que l’ouragan poursuit et qu’un torrent emporte !
Il lutte, mais en vain ! il s’élève, il s’abat ;
Les airs autour de lui redoublent leur combat ;