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œuf, des noisettes et des nèfles ; j’en ai encore au service de Votre Majesté. — Je les accepte de bon cœur, » dit la reine, qui était charmée de l’espérance d’avoir des diamants. Elle reçut le présent, caressa la vieille, la pria de la venir voir ; et tous les courtisans, à l’exemple du roi et de la reine, donnèrent de grandes louanges à cette bonne femme. La reine lui demanda quel âge elle avait. « J’ai soixante ans, répondit-elle. — Vous n’en paraissez pas quarante, lui dit la reine, et vous pouvez encore penser à vous marier, car vous êtes fort aimable. »

À ce discours, le prince Mirtil, qui était très mal élevé, se mit à rire au nez de la vieille, et lui dit qu’il aurait bien du plaisir à danser à sa noce ; mais la bonne femme ne fit pas semblant de voir qu’il se moquait d’elle. Toute la cour partit ; la reine ne fut pas plus tôt arrivée dans son palais, qu’elle fit cuire l’œuf, et cassa les noisettes et les nèfles. Mais, au lieu de trouver un diamant dans l’œuf, elle n’y trouva qu’un petit poulet ; les noisettes et les nèfles étaient pleines de vers. Aussitôt la voilà dans une colère épouvantable. « Cette vieille est une sorcière, dit-elle, qui a voulu se moquer de moi ; je veux la faire mourir. » Elle assembla donc les juges pour faire le procès de la vieille femme ; mais l’Éveillé, qui avait tout entendu, courut à la cabane pour dire à la bonne femme de se sauver. « Bonjour, le page aux vieilles, lui dit-elle (car on lui avait donné ce nom depuis qu’il avait aidé à la tirer de la boue). — Ah ! ma bonne mère, lui dit l’Éveillé, hâtez-vous de vous sauver dans la maison de mon père ; c’est un très honnête homme, il vous cachera de bon cœur : car si vous demeurez dans votre cabane, on enverra des soldats pour vous prendre