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« Assurément, dit-il en lui-même, ce palais appartient à quelque bonne fée qui a eu pitié de ma situation. » Il regarda par la fenêtre et ne vit plus de neige, mais des berceaux de fleurs qui enchantaient la vue.

Il rentra dans la grande salle où il avait soupé la veille, et vit une petite table où il y avait du chocolat. « Je vous remercie, madame la fée, dit-il tout haut, d’avoir eu la bonté de penser à mon déjeuner. »

Le bonhomme, après avoir pris son chocolat, sortit pour aller chercher son cheval ; et comme il passait sous un berceau de roses, il se souvint que la Belle lui en avait demandé et cueillit une branche où il y en avait plusieurs. En même temps, il entendit un grand bruit et vit venir à lui une bête si horrible, qu’il fut tout près de s’évanouir. « Vous êtes bien ingrat, lui dit la bête d’une voix terrible ; je vous ai sauvé la vie en vous recevant dans mon château, et puis vous me volez mes roses, que j’aime mieux que toutes choses au monde. Il faut mourir pour réparer cette faute ; je ne vous donne qu’un quart d’heure pour demander pardon à Dieu. »

Le marchand se jeta à genoux, et dit à la bête en joignant les mains : « Monseigneur, pardonnez-moi ; je ne croyais pas vous offenser en cueillant une rose pour une de mes filles qui m’en avait demandé. — Je ne m’appelle point monseigneur, répondit le monstre, mais la Bête. Je n’aime pas les compliments, moi ; je veux qu’on dise ce que l’on pense : ainsi ne croyez pas me toucher par vos flatteries. Mais vous m’avez dit que vous aviez des filles ; je veux vous pardonner, à condition qu’une de vos filles vienne volontairement pour mourir à votre place. Ne me raisonnez pas, partez ; et si