Page:Lescure - Le Monde enchanté.djvu/448

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

autres : leurs noms et leurs devises étaient sur leurs houlettes. Dès le soir même, le jeune prince changea la sienne avec celle de l’aimable Mirtis.

Le lendemain, madame Tu-tu les mena dans les plus charmantes promenades du monde, et leur montra de bons pâturages pour leurs moutons et un beau pays pour la chasse.

« Vous pouvez, leur dit-elle, aller de ce côté jusqu’à cette belle rivière ; n’allez jamais jusqu’à l’autre bord et de ce côté-là ; chassez dans les bois : mais prenez garde, continua-t-elle, de passer un grand chêne qui est au milieu de la forêt ; il est fort remarquable, parce qu’il a les racines et le tronc de fer. Si vous allez plus avant, il pourrait vous arriver des malheurs dont je ne saurais vous garantir ; et après cela, je ne serais peut-être pas en état de vous secourir promptement, car une fée a bien de l’occupation. »

Ces jeunes bergers l’assurèrent qu’ils feraient exactement ce qu’elle leur prescrivait ; et se mettant à conduire leur troupeau tous quatre, madame Tu-tu demeura avec la bonne femme. Elle remarqua quelque inquiétude dans son air :

« Qu’avez-vous, Madame ? lui dit-elle ; quel nuage s’élève dans votre esprit ?

— Je ne vous nierai point, reprit la bonne femme, que j’ai de la peine de les laisser ainsi tous ensemble. Il y a quelque temps que je vois avec chagrin que Finfin et Lirette s’aiment peut-être plus que de raison ; et voici, pour m’accabler, une autre amitié qui se forme : le prince et Mirtis ne se haïssent pas ; je crains d’abandonner leur jeunesse à l’égarement de leur cœur.

Vous avez si bien élevé ces deux jeunes filles, répli-