Page:Lescure - Le Monde enchanté.djvu/394

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

vue changer de couleur, si celles de son visage eussent été naturelles ; pour sa confidente, ce fut en vain qu’elle tourna les yeux de tous côtés pour se sauver, elle sentit bientôt que cette espérance lui était interdite.

La savante Serène, mettant pied à terre, s’avança vers le bûcher : elle tenait dans sa main droite la baguette de vérité. Cette baguette était d’un or si brillant, qu’elle éblouissait la vue.

Elle fit semblant d’ignorer le sujet du spectacle qui s’offrait à ses yeux ; et, l’ayant demandé au calife : « C’est, dit-il, la carcasse d’une certaine Fleur d’Épine que nous allions brûler.

— Et que vous avait-elle fait, lui dit-elle d’un ton sévère, que vous avait-elle fait, cette Fleur d’Épine, pour la brûler toute vive ? »

L’assemblée frémit d’étonnement ou de joie à ces paroles. Le calife, lui ayant demandé pardon d’avoir oublié que c’était sa fille, ne laissait pas de soutenir qu’elle était morte, et, pour preuve de cela, qu’il avait été sur le point de la brûler.

Serène, sans daigner lui répondre, ordonna qu’on descendît Fleur d’Épine du bûcher ; et, l’ayant fait étendre sur un lit de repos qu’on apporta du palais, elle s’approcha d’elle, et se retournant vers le calife : « Vous allez voir, dit-elle, qu’elle n’est pas morte ; il y en a parmi vous qui ne le savent que trop. »

En achevant de parler, elle toucha Fleur d’Épine au front du bout de sa baguette ; et, dans un instant, on la vit ranimée, et ses yeux s’ouvrirent : mais on lui vit l’étonnement d’une personne qui, sortant d’un long sommeil, se trouve dans des lieux inconnus.

L’auguste Serène parut surprise de l’affreux changement