Page:Lescure - Le Monde enchanté.djvu/392

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

soudain de jalousie, qui devait l’accabler, ranima ce qui lui restait de force ; mais ce fut pour la livrer à de nouveaux supplices.

La princesse, accompagnée du calife son père et de toute la cour, arriva dans ce moment. Sa surprise fut extrême à l’aspect d’une figure comme celle auprès de laquelle Tarare était à genoux ; mais l’étonnement de Fleur d’Épine fut encore plus grand à la vue d’une beauté qui lui parut surpasser tout ce qu’on lui en avait dit. Ce fut alors que sa constance et ce qui lui restait de force l’abandonnèrent à la fois : elle tint quelque temps les yeux attachés sur Luisante ; elle les tourna ensuite vers son amant, et, un moment après, elle les ferma pour jamais.

Il en fit un cri qui fit tressaillir l’assemblée, et donna quelque émotion à la princesse.

Le calife s’en aperçut, et, pour la rassurer : « Ce n’est rien, ma fille, que ce cri de douleur ; vous verrez que cette carcasse qu’il regrette était quelque vieille parente ; et il faut bien donner quelque chose au sang. « Puis, s’adressant à lui : « Allons, Tarare, dit-il, qu’on se lève, et qu’on s’essuie les yeux ; c’est se moquer de faire ici l’enfant pour une momie, quand on vient vous offrir le royaume de Cachemire avec la main de Luisante. »

Je ne sais quelle réponse un autre aurait faite à une harangue comme celle-là : mais, Tarare n’y répondant d’aucune manière, l’assemblée le crut mort aussi bien que Fleur d’Épine.

On en était là, quand la More arriva ; elle parut s’affliger de la mort de Fleur d’Épine, et entra dans la douleur de Tarare ; mais voyant l’embarras du calife, elle lui conseilla