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ver des statues ; d’autres opinèrent pour le grand et le petit triomphe. Le calife consentait à tout pour honorer tant de mérite ; mais Tarare s’en défendant avec modestie : « Ah, Sire ! s’écria-t-il, quels soins vous occupent aussi bien que votre sage conseil ! Dans une conjoncture comme celle-ci, ce que j’ai fait pour vous et pour l’État ne demande point de pareilles récompenses : est-il temps d’en parler avant que ce service ait produit son effet ? Je n’ose vous dire qu’il y a eu quelque peu d’imprudence dans l’empressement dont vos courriers m’ont fait venir ici : j’allais remettre entre les mains de Serène ce que je n’ai enlevé que pour elle. Je vous aurais apporté le remède tant désiré, au lieu qu’il faudra que j’y retourne, et qu’on attende mon retour. »

Le calife lui en demanda bien humblement pardon, et en attribua la faute à son conseil. Son conseil la rejeta sur les ordres de la princesse, qui gouvernait depuis l’aveuglement de son père, et que la sénéchale gouvernait absolument.

Il fut résolu que Tarare partirait dès le lendemain avec les trésors de la sorcière.

Le calife voulut absolument que Fleur d’Épine fut logée cette nuit chez la sénéchale, comme dans le lieu le plus honorable après son palais : « Car, dit-il à Tarare, vous voyez, par mon exemple, qu’il ne fait pas bon auprès de Luisante. » Tarare l’y conduisit ; et la femme more était si empressée à la servir, et le faisait avec tant d’adresse, qu’elle en fut charmée. Tarare ne voulut pas seulement aller au palais, de peur de renouveler ses alarmes. Il fallut pourtant quitter Fleur d’Épine, et mettre ordre à son départ pour le jour suivant. Son impatience lui fit bientôt dépêcher tout cela.

À son retour, il trouva Fleur d’Épine occupée à consi-