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Il se dit plusieurs choses fort tendres de part et d’autre sur cette contestation, dont se passera fort bien le lecteur, qui d’ordinaire saute autant de ces conversations qu’il en trouve, pour arriver promptement à la fin du conte.

La nuit arriva bientôt après leur repas. Fleur d’Épine, qui n’avait fait que dormir toute l’après-dînée, aurait bien voulu se remettre en chemin.

L’innocence de ses sentiments, le respect de celui qui l’accompagnait, et la coutume, semblaient suffire pour lui mettre l’esprit en repos. Cependant, comme elle était délicate sur la bienséance, elle crut qu’il y en aurait plus à voyager tête à tête qu’à rester ensemble toute la nuit. Mais elle était embarrassée pour Tarare, qui vraisemblablement avait besoin de repos. Il connut sa pensée, entra dans ses sentiments ; et, l’ayant fort assurée qu’il n’était pas assez lâche pour dormir auprès d’elle, ils se remirent en chemin, dans l’espérance d’arriver chez l’illustre Serène à la pointe du jour.

L’harmonie de Sonnante surprit et charma tout ce qui se trouva sur leur passage. Dans les bois qu’ils traversaient, les oiseaux, trompés par l’éclat du chapeau, croyaient saluer le jour naissant, lorsqu’ils répondaient au son agréable des sonnettes d’or. Les coqs des villages croyaient de même chanter pour l’aube du jour, et réveillaient les pauvres laboureurs qui venaient de s’endormir, pour retourner vitement à leur travail. Mais Fleur d’Épine n’avait qu’à ôter le chapeau de dessus sa tête, la nuit revenait, et les bonnes gens se rendormaient.

Le véritable jour vint enfin, et Tarare promettait à sa belle maîtresse qu’elle saluerait bientôt son illustre mère :