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mer de son dessein, ne sachant pas si la route qu’elle tenait les conduirait où ils voulaient aller. C’est pourquoi lui ayant remis la bride sur le cou. : « Sonnante, lui dit-il, je sais bien qu’on ne se peut égarer avec vous : nous voulons aller au pays de Cachemire ; il est tout environné de montagnes et de précipices d’un côté, et c’est celui qui est auprès de la demeure de Serène ; menez-nous-y par ce côté.

— Et pourquoi au pays de Cachemire ? lui dit Fleur d’Épine. N’est-ce pas celui de Luisante ? — C’est le royaume de son père, dit-il, et c’est à son père que j’ai promis de porter les dépouilles de la sorcière, telles que les demande Serène.

— Et quoi ! lui dit-elle un peu troublée, ne m’avez-vous pas dit que, quoique vous eussiez entrepris ce dangereux exploit pour Luisante, vous n’aviez songé qu’au plaisir de me délivrer en l’achevant ? Que j’étais folle, poursuivit-elle, de me flatter un moment qu’on pût oublier la plus belle personne du monde, pour songer à une créature comme Fleur d’Épine ! Pourquoi me le disiez-vous, puisque vous ne le pensiez pas ? Ah, Tarare ! dit-elle en laissant tomber quelques larmes, je vois bien que votre seul empressement est de paraître devant les beaux yeux qui vous charment encore, chargé des dépouilles que vous lui avez promises, et lui menant Fleur d’Épine en triomphe. Si vous ne m’aviez point trompée, vous ne l’iriez pas chercher : après avoir trouvé ce que vous sembliez craindre si fort de perdre, qui vous empêcherait de me conduire en votre pays ? Pourquoi me faites-vous éprouver qu’il y a des maux plus grands que ceux dont vous m’avez délivrée ? Si vous ne m’aviez point flattée, mon cœur, toujours tranquille, ne me ferait point envisager comme le plus grand des malheurs celui d’être sa-