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m’intriguèrent fort, je me mis à pleurer. Perroquet et Toutou me consolèrent de leur mieux, car ils m’aimaient tendrement. Puis Perroquet me présenta la bague du prince, et me montra le portrait. J’avoue que je n’ai jamais été si aise que je le fus de pouvoir considérer de près celui que je n’avais vu que de loin. Il me parut encore plus aimable qu’il ne m’avait semblé ; il me vint cent pensées dans l’esprit, dont les unes agréables, et les autres tristes, me donnèrent un air d’inquiétude extraordinaire. Les fées qui vinrent me voir s’en aperçurent. Elles se dirent l’une à l’autre que sans doute je m’ennuyais, et qu’il fallait songer à me trouver un époux de race fée. Elles parlèrent de plusieurs, et s’arrêtèrent sur le petit roi Migonnet, dont le royaume était à cinq mille lieues de leur palais ; mais ce n’était pas là une affaire. Perroquet entendit ce beau conseil ; il vint m’en rendre compte, et me dit : « Ha ! que je vous plains, ma chère maîtresse, si vous devenez la reine Migonnette ! c’est un magot qui fait peur : j’ai regret de vous le dire, mais, en vérité, le roi qui vous aime ne voudrait pas de lui pour être son valet de pied. — Est-ce que tu l’as vu, Perroquet ? — Je le crois vraiment, continua-t-il, j’ai été élevé sur une branche avec lui. — Comment ! sur une branche ? repris-je. — Oui, dit-il, c’est qu’il a les pieds d’un aigle. »

« Un tel récit m’affligea étrangement ; je regardais le charmant portrait du jeune roi, je pensais bien qu’il n’en avait régalé Perroquet que pour me donner lieu de le voir ; et, quand j’en faisais comparaison avec Migonnet, je n’espérais plus rien de ma vie, et je me résolvais plutôt à mourir qu’à l’épouser.