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hommes et les enfants, et qui faisait mourir les arbres et les plantes du souffle de son haleine.

« Le roi se trouva dans la dernière désolation : il consulta tous les sages de son royaume sur ce qu’il devait faire pour garantir ses sujets des malheurs dont il les voyait accablés. Ils lui conseillèrent d’envoyer chercher par tout le monde les meilleurs médecins et les plus excellents remèdes, et, d’un autre coté, qu’il fallait promettre la vie aux criminels condamnés à la mort qui voudraient combattre le dragon. Le roi, assez satisfait de cet avis, l’exécuta et n’en reçut aucune consolation : car la mortalité continuait, et personne n’allait contre le dragon qui n’en fût dévoré ; de sorte qu’il eut recours à une fée dont il était protégé dès sa plus tendre jeunesse. Elle était fort vieille, et ne se levait presque plus ; il alla chez elle, il lui fit mille reproches de souffrir que le destin le persécutât sans le secourir. « Comment voulez-vous que je fasse ? lui dit-elle ; vous avez irrité mes sœurs ; elles ont autant de pouvoir que moi, et rarement nous agissons les unes contre les autres. Songez à les apaiser en leur donnant votre fille : cette petite princesse leur appartient ; vous avez mis la reine dans une étroite prison : que vous a donc fait cette femme si aimable pour la traiter si mal ? Résolvez-vous de tenir la parole qu’elle a donnée ; je vous assure que vous serez comblé de biens. »

« Le roi mon père m’aimait chèrement ; mais, ne voyant point d’autre moyen de sauver ses royaumes et de se délivrer du fatal dragon, il dit à son amie qu’il était résolu de la croire, qu’il voulait bien me donner aux fées, puisqu’elle assurait que je serais chérie et traitée en princesse de mon rang ; qu’il ferait aussi revenir la reine, et qu’elle n’avait