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manger de beaux fruits et pour en emporter tant qu’il lui plairait.

« Il n’y eut aucune de ses dames qui ne crût la reine en délire, et que dans ce moment elle rêvait à ces fruits qu’elle avait tant souhaités ; de sorte qu’au lieu de lui répondre, elles se prirent à pleurer, et firent éveiller tous les médecins pour voir en quel état elle était. Ce retardement désespérait la reine ; elle demandait promptement ses habits, on les lui refusait ; elle se mettait en colère et devenait fort rouge. L’on disait que c’était l’effet de sa fièvre ; cependant les médecins, étant entrés, après lui avoir touché le pouls et fait leurs cérémonies ordinaires, ne purent nier qu’elle ne fût dans une parfaite santé. Ses femmes, qui virent la faute que le zèle leur avait fait commettre, tâchèrent de la réparer en l’habillant promptement. Chacune lui demanda pardon, tout fut apaisé, et elle se hâta de suivre la vieille fée qui l’avait toujours attendue.

« Elle entra dans le palais, où rien ne pouvait être ajouté pour en faire le plus beau lieu du monde ; vous le croirez aisément, seigneur, ajouta la reine chatte blanche, quand je vous aurai dit que c’est celui où nous sommes ; deux autres fées, un peu moins vieilles que celle qui conduisait ma mère, la reçurent à la porte et lui firent un accueil très favorable. Elle les pria de la mener promptement dans le jardin, et vers les espaliers où elle trouverait les meilleurs fruits. « Ils sont tous également bons, lui dirent-elles, et, si ce n’est que tu veux avoir le plaisir de les cueillir toi-même, nous n’aurions qu’à les appeler pour les faire venir ici. — le vous supplie, Mesdames, dit la reine, que j’aie la satisfaction de voir une chose si extraordinaire. » La