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point : l’on s’impatientait beaucoup de le voir tant tarder. Enfin, comme on allait envoyer le presser de revenir, on entendit des cris de petits enfants dans la chambre de Riche-Cautèle. Cela surprit tout le monde, car il ne paraissait point d’enfants. Quelqu’un prêta l’oreille, et on découvrit que ces cris venaient des boîtes de l’empirique.

C’étaient, en effet, les neveux de Finette. Cette princesse leur avait fait prendre beaucoup de nourriture avant que de venir au palais ; mais comme il y avait déjà longtemps, ils en souhaitaient de nouvelle, et ils expliquaient leurs besoins en chantant sur un ton dolent. On ouvrit les boîtes, et l’on fut surpris d’y voir effectivement deux marmots qu’on trouva fort jolis. Riche-Cautèle se douta aussitôt que c’était encore un nouveau tour de Finette ; il en conçut une fureur qu’on ne peut pas dire, et ses maux en augmentèrent à un tel point, qu’on vit bien qu’il fallait qu’il en mourût.

Bel-à-Voir en fut pénétré de douleur ; et Riche-Cautèle, perfide jusqu’à son dernier moment, songea à abuser de la tendresse de son frère. « Vous m’avez toujours aimé, prince, lui dit-il, et vous pleurez ma perte. Je n’ai plus besoin des preuves de votre amitié par rapport à la vie. Je meurs ; mais si je vous ai été véritablement cher, promettez-moi de m’accorder la prière que je vais vous faire. »

Bel-à-Voir, qui, dans l’état où il voyait son frère, se sentait incapable de lui rien refuser, lui promit, avec les plus terribles serments, de lui accorder tout ce qu’il lui demanderait. Aussitôt que Riche-Cautèle eut entendu ces serments, il dit à son frère, en l’embrassant : « Je meurs consolé, prince, puisque je serai vengé ; car la prière que j’ai à vous faire, c’est de demander Finette en mariage aussitôt que je serai