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et s’en retourna aussitôt dans sa chambre. Un moment après, Riche-Cautèle y revint, et la princesse le conduisit où elle venait de faire le lit, et se retira.

Le prince, sans se déshabiller, se jeta sur le lit avec précipitation, et, sa pesanteur ayant fait tout d’un coup rompre les petits bâtons, il tomba au fond de l’égout, sans pouvoir se retenir, en se faisant vingt bosses à la tête, et en se fracassant de tous côtés. La chute du prince fit un grand bruit dans le tuyau : d’ailleurs, il n’était pas éloigné de la chambre de Finette ; elle sut aussitôt que son artifice avait eu tout le succès qu’elle s’était promis, et elle en ressentit une joie secrète qui lui fut extrêmement agréable. On ne peut pas décrire le plaisir qu’elle eut de l’entendre barboter dans l’égout. Il méritait bien cette punition, et la princesse avait raison d’en être satisfaite.

Mais sa joie ne l’occupait pas si fort qu’elle ne pensât plus à ses sœurs. Son premier soin fut de les chercher. Il lui fut facile de trouver Babillarde. Riche-Cautèle, après avoir enfermé cette princesse à double tour, avait laissé la clef à sa chambre. Finette entra dans cette chambre avec empressement, et le bruit qu’elle fit réveilla sa sœur en sursaut. Elle fut bien confuse en la voyant. Finette lui raconta de quelle manière elle s’était défaite du prince fourbe qui était venu pour les outrager, Babillarde fut frappée de cette nouvelle comme d’un coup de foudre ; car, malgré son caquet, elle était si peu éclairée, qu’elle avait cru ridiculement tout ce que Riche-Cautèle lui avait dit. Il y a encore des dupes comme celle-là au monde.

Cette princesse, dissimulant l’excès de sa douleur, sortit de sa chambre pour aller avec Finette chercher Nonchalante.