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lui répondit qu’il ne pouvait se résoudre à aller trouver les princesses, qu’elle n’eût consenti à l’épouser, parce que ses sœurs ne manqueraient pas de s’y opposer, à cause de leur droit d’aînesse.

Finette, qui se défiait avec raison de ce prince perfide, sentit redoubler ses soupçons par cette réponse : elle trembla de ce qui pouvait être arrivé à ses sœurs, et se résolut de les venger du même coup qui lui ferait éviter un malheur pareil à celui qu’elle jugeait qu’elles avaient eu. Cette jeune princesse dit donc à Riche-Cautèle qu’elle consentait sans peine à l’épouser, mais qu’elle était persuadée que les mariages qui se faisaient le soir étaient toujours malheureux ; qu’ainsi elle le priait de remettre la cérémonie de se donner une foi réciproque au lendemain matin : elle ajouta qu’elle l’assurait de n’avertir les princesses de rien, et lui dit qu’elle le priait de la laisser un peu de temps seule, pour penser au ciel ; qu’ensuite elle le mènerait dans une chambre où il trouverait un fort bon lit, et qu’après elle reviendrait s’enfermer chez elle jusqu’au lendemain.

Riche-Cautèle, qui n’était pas un fort courageux personnage, et qui voyait toujours Finette armée du gros marteau, dont elle badinait comme on fait d’un éventail ; Riche-Cautèle, dis-je, consentit à ce que souhaitait la princesse, et se retira pour la laisser quelque temps méditer. Il ne fut pas plus tôt éloigné, que Finette courut faire un lit sur le trou d’un égout qui était dans une chambre du château. Cette chambre était aussi propre qu’une autre ; mais on jetait dans le trou de cet égout, qui était fort spacieux, toutes les ordures du château. Finette mit sur ce trou deux bâtons croisés très faibles ; puis elle fit bien proprement un lit par-dessus,