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faire. Il se leva de bon matin, et alla au bord d’un ruisseau, où il remplit ses poches de petits cailloux blancs, et ensuite revint à la maison. On partit, et le Petit-Poucet ne découvrit rien de tout ce qu’il savait à ses frères.

Ils allèrent dans une forêt fort épaisse, où, à dix pas de distance, on ne se voyait pas l’un l’autre. Le bûcheron se mit à couper du bois, et ses enfants à ramasser des broutilles, pour faire des fagots. Le père et la mère, les voyant occupés à travailler, s’éloignèrent d’eux insensiblement, et puis s’enfuirent tout à coup par un petit sentier détourné.

Lorsque ces enfants se virent seuls, ils se mirent à crier et à pleurer de toute leur force. Le Petit-Poucet les laissait crier, sachant bien par où il reviendrait à la maison, car en marchant il avait laissé tomber, le long du chemin, les petits cailloux blancs qu’il avait dans ses poches. Il leur dit donc : « Ne craignez point, mes frères ; mon père et ma mère nous ont laissés ici, mais je vous ramènerai bien au logis : suivez-moi seulement. »

Ils le suivirent, et il les mena jusqu’à leur maison par le même chemin qu’ils étaient venus dans la forêt. Ils n’osèrent d’abord entrer, mais ils se mirent tous contre la porte, pour écouter ce que disaient leur père et leur mère.

Dans le moment que le bûcheron et la bûcheronne arrivèrent chez eux, le seigneur du village leur envoya dix écus, qu’il leur devait il y avait longtemps, et dont ils n’espéraient plus rien. Cela leur redonna la vie, car les pauvres gens mouraient de faim. Le bûcheron envoya sur l’heure sa femme à la boucherie. Comme il y avait longtemps qu’ils n’avaient mangé, elle acheta trois fois plus de viande qu’il n’en fallait pour le souper de deux personnes. Lorsqu’ils furent ras-