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disais-je, ces gens-ci sont bien heureux de porter le joug de la servitude sans le sentir ; car enfin, s’ils le sentaient, il me semble qu’ils auraient des manières moins orgueilleuses. Je m’adressai à un grave et gros personnage qui se tenait à la porte du cabinet de l’archevêque, pour l’ouvrir et la fermer quand il le fallait. Je lui demandai civilement s’il n’y avait pas moyen de parler à monseigneur. Attendez, me dit-il d’un air sec ; Sa Grandeur va sortir pour aller entendre la messe ; elle vous donnera en passant un moment d’audience. Je ne répondis pas un mot. Je m’armai de patience, et je m’avisai de vouloir lier conversation avec quelques-uns des officiers ; mais ils commencèrent à m’examiner depuis les pieds jusqu’à la tête, sans daigner me répondre une syllabe ; après quoi ils se regardèrent les uns les autres en souriant avec orgueil de la liberté que j’avais prise de me mêler à leur entretien.

Je demeurai, je l’avoue, tout déconcerté de me voir traiter ainsi par des valets. Je n’étais pas encore bien remis de ma confusion, quand la porte du salon s’ouvrit. L’archevêque parut. Il se fit aussitôt un profond silence parmi ses officiers, qui quittèrent tout à coup leur maintien insolent pour en prendre un respectueux devant leur maître. Ce prélat était dans sa soixante-neuvième année, fait à peu près comme mon oncle le chanoine Gil Perez, c’est-à-dire gros et court. Il avait par-dessus le marché les jambes fort tournées en dedans, et il était si chauve, qu’il ne lui restait qu’un toupet de cheveux par derrière ; ce qui l’obligeait d’emboîter sa tête dans un bonnet de laine fine à longues oreilles. Malgré tout cela, je lui trouvais l’air d’un homme de qualité, sans doute parce que je savais qu’il en était un. Nous autres personnes du commun, nous regardons les grands seigneurs avec une prévention qui leur prête souvent un air de grandeur que la nature leur a refusé.

L’archevêque s’avança vers moi d’abord, et me demanda d’un ton de voix plein de douceur ce que je