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le désappointement de son ambitieuse espérance d’exciter l’admiration des habitants de sa ville natale, deviennent comme une expiation proportionnée à l’offense. Enfin l’histoire de Gil Blas est conçue et arrangée de façon à amuser sans cesse ; l’ouvrage eût gagné peut-être si l’auteur avait parfois introduit une morale plus mâle et plus sévère. »


Le maître a parlé. Le jugement est porté avec étendue et plénitude, et en dernier ressort. Il n’y a que ce regret de la fin sur une morale plus sévère qui me paraît une légère concession de Walter Scott au public anglais et aux préjugés anglicans. Gil Blas ne pouvait se rattacher à une morale plus mâle et plus haute sans cesser d’être lui-même.

Charles Nodier, qui, par son tour d’esprit indulgent et gracieux, semblait si fait pour apprécier Gil Blas, a écrit à propos de ce roman une notice (1835) où l’on cherche vainement la jolie page à laquelle on avait droit de s’attendre. Ce ne sont qu’exagérations sur les qualités du style et récriminations déclamatoires contre les critiques espagnols. Passons.

M. Villemain, dans la XIe leçon de son Tableau du dix-huitième siècle, a parlé de Le Sage comme il le sait faire, en le replaçant au milieu des écrivains de son moment littéraire et de sa nuance. Cet ingénieux chapitre est plutôt un composé de tout ce qui a été dit sur Le Sage et sur Gil Blas qu’un nouveau témoignage directement apporté par l’élégant critique. Aussi serait-il difficile d’en extraire un jugement complet qui se détache : c’est une suite de méandres et de sinuosités agréables et fuyantes. Revenant sur l’accusation de plagiat qu’on a intentée contre Le