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me Oronte}}. Vous venez fort à propos, Monsieur, j'ai à vous dire que je ne suis plus dans le dessein de marier ma fille à Damis. M.Oronte. Ah ah ! peut-on savoir, Madame, pourquoi vous avez changé de résolution ? Mme Oronte. C'est qu'il se présente un meilleur parti pour Angélique. Valère la demande, il n'est pas à la vérité si riche que Damis ; mais il est gentilhomme, et en faveur de sa noblesse, nous devons lui passer son peu de bien. Lisette. Bon. M.Oronte. J'estime Valère, et sans faire attention à son peu de bien, je lui donnerais très volontiers ma fille, si je le pouvais avec honneur; mais cela ne se peut pas, Madame. Mme Oronte. D'où vient, Monsieur ? M.Oronte. D'où vient ? Voulez-vous que nous manquions de parole à Monsieur Orgon notre ancien ami ? Avez-vous quelque sujet de vous plaindre de lui? Mme Oronte. Non. Lisette, bas. Courage ne mollissez point. M.Oronte. Pourquoi donc lui faire un pareil affront ? Songez que le contrat est signé, que tous les préparatifs sont faits, et que nous n'attendons que Damis. La chose n'est-elle pas trop avancée pour s'en dédire ? Mme Oronte. Effectivement je n'avais pas fait toutes ces réflexions. Lisette, bas. Adieu, la girouette va tourner. M.Oronte. Vous êtes trop raisonnable, Madame, pour vouloir vous opposer à ce mariage. Mme Oronte. Oh je ne m'y oppose pas. Lisette. Mort de ma vie, est-ce là une femme, elle ne contredit point. Mme Oronte. Vous le voyez, Lisette, j'ai fait ce que j'ai pu pour Valère. Lisette. Oui, vraiment, voilà un amant bien protégé.


Scène VIII

M. Oronte, Mme Oronte, Angélique, Lisette, La Branche

M.Oronte. J'aperçois le valet de Damis. La Branche. Très humble serviteur à Monsieur et à Madame Oronte ; serviteur très humble à Mademoiselle Angélique ; bon jour Lisette. M.Oronte. Hé bien, La Branche, quelle nouvelle ? La Branche. Monsieur Damis votre gendre et mon maître vient d'arriver de Chartres. Il marche sur mes pas. J'ai pris les devants pour vous en avertir. Angélique, bas. Ô ciel ! M.Oronte. Je l'attendais avec impatience, mais pourquoi n'est-il pas venu tout droit chez moi ? Dans les termes où nous en sommes, doit-il faire ces façons-là ? La Branche. Oh, Monsieur, il sait trop bien vivre pour en user si familièrement avec vous, c'est le garçon de France qui a les meilleures manières; quoique je sois son valet, je n'en puis dire que du bien. Mme Oronte. Est-il poli, est-il sage ? La Branche. S'il est sage, Madame ? il a été élevé avec la plus brillante jeunesse de Paris, tudieu ! c'est une tête bien sensée. M.Oronte. Et Monsieur Orgon n'est-il pas avec lui ? La Branche. Non, Monsieur, de vives atteintes de goutte l'ont empêché de se mettre en chemin. M.Oronte. Le pauvre bonhomme. La Branche. Cela l'a pris subitement la veille de notre départ. Voici une lettre qu'il vous écrit. Il donne une lettre à Monsieur Oronte. M.Oronte {{didascalie| lit