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j’emportais la valise de mon Anglais, mais je la lui renverrai intacte !… Ah ! par exemple ! il n’y a que sa voiture que je ne pourrai pas lui renvoyer !

STROGOFF.

Pourquoi donc ?

JOLLIVET.

Parce que c’est… ou plutôt c’était une télègue ! Vous savez, une télègue… une voiture à quatre roues ?…

STROGOFF.

Parfaitement !… Mais je ne comprends pas…

JOLLIVET.

Vous allez comprendre… Nous partons… mon iemskik sur le siège de devant et moi sur le banc d’arrière ! Trois bons chevaux dans les brancards ! Nous filons comme l’ouragan ! À peine s’il est nécessaire de stimuler du bout du fouet nos trois excellentes bêtes ! De temps à autre seulement, quelques bonnes paroles jetées par mon iemskik ! Hardi, mes colombes !… Volez, mes doux agneaux ! Houp, mon petit père de gauche !… Enfin l’attelage tirait, tant et si bien que, la nuit dernière, un fort cahot se produit… crac ! Les deux trains de la voiture s’étaient séparés… et mon iemskik, sans entendre mes cris, continuait à courir sur le train de devant, tandis que je restais en détresse sur le train de derrière ! Et voilà comment je dus faire vingt verstes à pied, ma valise d’une main, celle de l’Anglais de l’autre, et voilà pourquoi je ne pourrai lui renvoyer qu’une demi-voiture !

LE MAÎTRE DE POSTE, rentrant.

Votre chambre est prête, monsieur.

JOLLIVET, se dirigeant vers la porte.

C’est bien… Au revoir, monsieur Korpanoff.

STROGOFF.

Au revoir, monsieur.

JOLLIVET, revenant.

Ah ! j’ai trouvé !

STROGOFF.

Qui donc ?

JOLLIVET.

La véritable définition de la télègue !… Ce sera le mot de la fin de ma prochaine chronique ! (Écrivant sur son carnet.) « Télègue, voiture russe…