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francs. Toutes mes économies y ont passé ; mais j’ai le gentleman qu’il me fallait.

MARGARET.

Et John Forster ?

PASSEPARTOUT.

Eh bien, John Forster n’a plus eu qu’à se faire mettre à la porte. Ah ! ça n’a pas été commode avec M. Fogg, qui ne s’émeut pas facilement. Forster a négligé d’abord de brosser les habits ; M. Fogg n’a rien dit. Forster a brisé deux glaces, la première volontairement, et la seconde en le faisant exprès ; M. Fogg n’a rien dit. Cela devenait désespérant. Heureusement ce matin, ce matin même, Forster a apporté à M. Fogg l’eau pour sa barbe. M. Fogg a sonné Forster : « John, lui a-t-il dit de sa voix la plus calme, John, il était stipulé entre nous que l’eau pour ma barbe aurait toujours trente-cinq degrés l’hiver ; celle-ci n’en a que trente-quatre ; à partir de ce moment, onze heures dix-sept, vous n’êtes plus à mon service. » Et voilà comment le flegmatique gentleman va entrer au mien.

MARGARET.

Et si vous ne lui convenez pas, Passepartout ?

PASSEPARTOUT.

Il me convient ! cela suffit, Margaret.

MARGARET.

Ainsi, c’est bien décidé ?

PASSEPARTOUT.

Quoi ?

MARGARET.

Vous ne voulez pas de moi pour femme, mon petit Passepartout ?…

PASSEPARTOUT.

Non, Margaret ! Le petit Passepartout ne passera pas sous vos fourches caudines.

MARGARET.

Passepartout ! Passepartout ! Je ferai un coup de tête !

PASSEPARTOUT.

Faites.

MARGARET.

On m’offre une place en Amérique ! J’irai en Amérique !

PASSEPARTOUT.

Bon voyage !