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de Fernand Mendez Pinto.




Continuation de noſtre voyage iuſqu’à noſtre arriuee à la ville de Pacaſſer, & de la grandeur d’vn Pagode que nous y viſmes.


Chapitre LXXXIX.



Continvant noſtre route à mont cette riuiere les deux premiers iours, nous ne viſmes aucune ville ny aucun edifice remarquable, horſmis ſeulement vn grand nombre de villages & petits bourgs de deux à trois cent feux, qui eſtoient le long de la riuiere, & qui ſelon l’apparence de leurs baſtimens ſembloient eſtre loges de peſcheurs & de pauures gens qui viuoient du trauail de leurs mains. Quant au reſte tout ce que la veuë pouuoit deſcouurir dans le païs n’eſtoit que bois de grands ſapins, bocages, foreſts, & oragers, enſemble des plaines de bleds, riz, millets, panis, orges, ſeigles, legumes, lins, & cottons auec de grands enclos de iardins & de belles maiſons de plaiſance, qui deuoient appartenir aux Mandarins & aux Seigneurs du Royaume. Il y auoit auſſi le long de la riuiere vn ſi grand nombre de beſtail de toute ſorte, que ie puis aſſeurer ſans mentir, qu’il n’y en a pas dauantage en l’Ethyopie, ou au païs du Preſte-Iean ; au plus haut des montagnes ſe voyoient diuerſes maiſons de leurs ſectes de Gentils, enſemble pluſieurs clochers tous dorez, dont l’eſclat paroiſſoit ſi grand & ſi magnifique par le dehors, qu’à les voir de loing il n’y auoit rien de ſi agreable aux yeux, pour la richeſſe qui s’y remarquoit, le quatrieſme iour de noſtre voyage nous arriuaſmes à vne fort bonne ville, qui s’appelloit Pocaſſer, deux fois plus grande que Cantano, & encloſe de fort bonnes murailles de pierre de taille, enſemble de tours & de boulleuars preſque à la façon des noſtres, auec vn quay ſur le bord de la riuiere d’enuiron la portée de deux fauconneaux, fer-