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de Fernand Mendez Pinto.




Comme nous partiſmes de ce lieu pour nous en aller à Pequin, & des merueilles de la ville de Nanquin.


Chapitre LXXXVIII.



Cette lettre nous ayant eſté donnée le lendemain deuant le iour, nous partiſmes de ce lieu priſonniers comme nous eſtions, de la façon que i’ay deſia dit, & cõtinuâmes noſtre voyage par des iournées incertaines, pour raiſon de l’impetuoſité du courant de l’eau qui eſtoit grand, à cauſe de la ſaiſon, enuiron le Soleil couché nous nous en allaſmes ancrer en vn petit village nommé Minhacutem, d’où eſtoit natif le Chifuu qui nous conduiſoit, & là meſme il auoit ſa femme & ſes enfans ; ce qui fut cauſe qu’il y demeura trois iours, à la fin deſquels il s’embarqua auec ſa famille. Ainſi nous paſſaſmes outre en la compagnie de pluſieurs autres vaiſſeaux, qui alloient ſur cette riuiere en diuers endroits de cét Empire. Or bien que nous fuſſions tous liez enſemble au banc de la Lanteaa où nous ramions, nous ne laiſſions pas neantmoins de voir les villes, citez & villages qui eſtoient ſituées le long de cette riuiere ; dequoy il me ſemble à propos de faire icy quelques deſcriptions. Pour cét effet ie commenceray par la ville de Nanquin d’oû nous eſtions partis. Cette ville eſt deſſous le Nord, à la hauteur de trẽte neuf degrez & trois quarts, ſituée le long de la riuiere nommé Batampina, qui ſignifie, Fleur de poiſſon. Cette riuiere ſelon ce qu’on nous en dit alors, & que i’ay veu depuis, vient de Tartarie, d’vn lac appellé Fanoſtir, à neuf lieuës de la ville de Lançame, où tient ſa Cour la pluſpart du temps Tamburlan Roy des Tartare. De ce meſme lac qui a 28. lieuës de long, douze de large, & vne grande profondeur, prennent leur ſource les plus grandes riuieres que i’ay veuës. La premiere eſt celle-cy appellée Batampina, qui paſſant par le milieu de cét Empire de la Chine, en