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de Fernand Mendez Pinto.

ſans qu’il leur en couſte rien. Ce fut en ces Iſles qu’Antonio de Faria moüilla l’ancre vn Mercredy matin. Mais deuant que paſſer outre Mem Taborda & Antonio Anriquez, luy demanderent congé de s’en aller aduertir la ville de ſon arriuée, afin de ſçauoir par meſme moyen quelles nouuelles il y auoit dans le pays, & s’il ne s’y parloit point de ce qu’il auoit fait à Nouday. Car en cas que ſon arriuée fuſt dommageable à ce lieu en la moindre choſe que ce fût, il eſtoit reſolu de s’en aller hyuerner en l’Iſle de Pullo Hinhor ; ſurquoy ils luy promirent de l’aduertir en diligence de tout ce qu’ils apprendroient. A cela Antonio de Faria fiſt reſponſe, qu’il approuuoit grandemẽt cet aduis, qu’il leur accorderoit le congé qu’ils demandoient. Alors il enuoya par eux meſmes certaines lettres qu’il addreſſoit aux principaux de ceux qui pour lors gouuernoit en la ville, par leſquelles il leur faiſoit vn bref recit du ſuccés de ſon voyage, & les prioit inſtãment de le conſeiller ſur ce qu’ils auoient enuie qu’il fiſt, adiouſtant qu’il eſtoit tout preſt à leur obeïr. A ces paroles de compliment il en adjouſta pluſieurs autres ſemblables, d’où il reuient ſouuẽt beaucoup de profit, ſans qu’elles couſtent rien. Antonio Anriquez & Mem Taborda partirent ce meſme iour ſur le tard, cependant qu’Antonio de Faria ne bougeaſt de là, en attendant les nouuelles qui luy viendraient ; il eſtoit bien deux heures de nuit quand il arriuerent tous deux à la ville, où ſi toſt que les habitans les virent, & qu’ils ſceurent d’eux les nouuelles qu’ils apportoient, enſemble le ſuccés de leur voyage, ils demeurerent fort eſtonnez ; comme en effet la nouueauté d’vn tel cas le requeroit ainſi. Ils s’aſſemblerent donc incontinent au ſon d’vne cloche dans l’Egliſe noſtre Dame de la Conception, qui eſtoit la Catedrale de ſix ou ſept qu’il y auoit en cette ville. Là ils traitterent entr’eux de ce qu’Antonio Anriquez & Mem Taborda leur auoient dit ; puis voyant qu’Antonio de Faria auoit vſé d’vne grande libéralité, tant enuers eux, qu’enuers tous les autres qui auoient part dans le Iunco, ils reſolurent de luy ſatisfaire en partie par des demonſtrations d’affection & de reconnoiſſance, faiſant ſuppleer tous les deux au peu de pouuoir qu’ils auoient. Pour cet effet ils luy firent pour reſponſe vne lettre