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de Fernand Mendez Pinto.

ché qu’elles n’y ſont d’aucune eſtime, ou qu’ils les ont euës à ſi bon prix, qu’ils n’ont donné pour icelles que beaucoup moins qu’elles ne valẽt. Car nous voyons qu’en vn ſeul coup de dé ils iettent au hazard vne piece de Damas, comme gens à qui cela ne couſte guere ; parolle qui fit ſouſrire ſecrettement Antonio de Faria, pour ce qu’il vit bien que ces peſcheurs auoient deſia la connoiſſance que cela auoit eſté volé ; ce qui fit qu’il leur dit qu’ils faiſoient cela comme de ieunes hommes, fils de fort riches Marchands, qu’à cauſe qu’ils eſtoient tels, il eſtimoient les choſes beaucoup moins qu’elles n’auoient couſté à leurs peres ; eux diſſimulants ce qu’ils auoient deſia reconneu, reſpondirent de cette ſorte ; il ſemble qu’il ſoit ainſi que vous le dites. Alors Antonio de Faria fit ſignal aux ſoldats qu’ils n’euſſent plus à iouër, & qu’ils cachaſſent les pieces qu’ils raffloient, pour n’eſtre point reconnus de ces gens-là, de peur d’eſtre tenus en qualité de voleurs, ce qu’ils firent incontinent ; & pour aſſeurer ces Chinois que nous eſtions gens de bien & marchands, le Capitaine fit ouurir les eſcotilles du Iunco, que la nuict precedente nous auions pris au Capitaine Sardinha, qui eſtoit chargé de poiure ; ce qui les remit vn peu, & leur oſta la mauuaiſe opinion qu’ils auoient de nous, diſans les vns aux autres, Puis que nous ſommes aſſeurez que ce ſont des marchands, nous pouuions librement reſpondre à leur demande, afin qu’ils ne croyent de nous, que pour eſtre rudes & ſauuages, nous ne ſçachions faire autre choſe, que peſcher des huiſtres & du poiſſon.