niche, au-dessus de la porte de San Petronio. On raconte que pendant qu’il y travaillait, le Francia, orfèvre et peintre excellent, vint pour la voir, ayant entendu parler avec force éloges de Michel-Ange et de ses œuvres, et n’en ayant encore vu aucune. Grâce à des intermédiaires, il put voir celle-là, et il en resta stupéfait. Michel-Ange lui ayant alors demandé ce qu’il lui en semblait, le Francia répondit que c’était une figure d’une belle coulée et d’un beau métal. Il parut alors à Michel-Ange que le Francia louait plus la matière que le travail et lui dit : « J’ai la même obligation au pape Jules II qui me l’a donnée à faire, que vous aux droguistes qui vous fournissent des couleurs pour peindre », et tout en colère, devant tous les assistants, il lui dit qu’il n’était qu’un imbécile. À ce sujet, un fils du Francia étant venu le voir, quelqu’un dit à Michel-Ange que c’était un beau jeune homme, et Michel-Ange lui dit : « Ton père fait de plus belles figures en chair qu’en peinture. » Parmi les gentilshommes qui assistèrent à ces divers incidents, il y en eut un, je ne sais son nom, qui demanda à Michel-Ange quelle était à son avis la plus grande, de la statue du pape, ou d’une paire de bœufs. Michel-Ange répondit : « Cela dépend des bœufs. S’il s’agit de ceux de Bologne, évidemment les nôtres de Florence sont plus petits. » Il termina en terre cette statue, avant que le pape partît de Bologne pour Rome ; Sa Sainteté étant allée la voir, on ne savait quoi mettre dans la main gauche de la statue, la main droite étant levée dans un mouvement si fier que le pape demanda si elle donnait la bénédiction ou la malédiction. Michel-Ange répondit que cela dépendrait du peuple de Bologne, selon qu’il serait avisé ou non, et ayant demandé au pape s’il devait lui mettre un livre dans la main gauche, Jules répondit : « Fais-moi tenir une épée, car je ne connais rien aux lettres. » Le pape laissa dans la banque de Messer Antonmaria da Lignano mille écus pour que la statue fût terminée, et elle fut enfin posée, après seize mois de travail, sur le fronton de la façade antérieure de San Petronio. Elle fut jetée à terre par les Bentivogli[1], et le bronze en fut vendu au duc Alphonse de Ferrare, qui en fit faire une pièce d’artillerie nommée la Giulia ; la tête seule fut sauvée et se trouve actuellement dans la garde-robe du duc[2].
Tandis que le pape s’en était retourné à Rome, et que Michel-Ange terminait sa statue à Bologne, étant donc absent de Rome, Bramante, ami et parent de Raphaël d’Urbin, et par conséquent peu ami de Michel-