couleur tellement foncée que les figures qui viennent après en aient de plus claires que les premières. Au contraire, de même qu’elles vont en diminuant peu à peu et en s’éloignant, pareillement doivent-elles aller en teinte foncée progressive, pour la couleur des carnations et des vêtements. Que l’on ait surtout grande attention d’affecter toujours les couleurs les plus belles, les plus riantes et les plus agréables aux figures principales, particulièrement à celles qui dans le tableau sont entières et non pas à mi-corps. Ce sont celles que l’on considère toujours le plus, celles qui sont plus en vue que les autres, qui servent en quelque sorte de fond au coloris des premières. Une couleur plus amortie fait paraître plus vive celle qui lui est juxtaposée ; les teintes pâles et tristes font paraître plus gaies celles qui sont à côté et leur donnent un certain éclat. On ne doit pas couvrir un nu d’une couleur si riche de corps qu’elle différencie les chairs des draperies, quand celles-ci séparent deux parties nues. Au contraire, que les couleurs des parties éclairées de ces draperies soient claires, semblables à celles des chairs, jaunâtres ou tirant sur le rouge, violet pourpre ou couleur de violette, avec des fonds changeants, quelque peu foncés, verts ou azurés violets ou jaunes, pourvu qu’ils tirent sur le foncé, qu’ils soient unis et s’accordent avec les ombres des figures dans leurs rondeurs. Il faut que ce soit analogue à ce que nous voyons dans la réalité, car les parties qui s’offrent plus proches à l’œil sont plus éclairées, et les autres qui s’éloignent de la vue perdent d’autant plus de lumière et de couleur. Pareillement doit-on employer en peinture les couleurs avec tant d’union que l’on n’ait pas un foncé et un clair ombré et éclairé d’une manière déplaisante, au point qu’il en résulte discordance et contraste désagréable. Il faut excepter les ombres projetées, c’est à dire les ombres portées par une figure sur une autre, quand une seule lumière vient frapper la première. Même quand ce cas se produit, ces ombres doivent être peintes avec douceur et union. En effet, celui qui les reproduit sans ordre fait en sorte que sa peinture paraît plutôt un tapis de couleurs ou un jeu de cartes que de la chair unie, des draperies souples, ou d’autres objets soyeux, doux et délicats. De même que l’oreille est offensée par une musique qui n’est que vacarme, dissonances et duretés (exception faite pour quelques lieux et temps, comme par exemple des ombres projetées), de même l’œil ne supporte pas des couleurs trop chargées ou trop crues. Le ton trop ardent nuit au dessin, le ton trouble, éteint, amorti, ou trop doux paraît une chose morte, vieille et enfumée. Mais la couleur unie, qui tient le milieu entre le vif et l’éteint, est parfaite et flatte l’œil,
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