trois croix[1]. Il eût été impossible de mieux rendre le mort qui ressuscite au toucher de la croix, la joie qu’éprouve sainte Hélène et l’étonnement des spectateurs qui s’agenouillent pour l’adorer. Mais ce qui dépasse toute autre considération, c’est la manière dont il représenta la nuit et un ange en raccourci qui apporte, en volant de haut en bas, le signe de la victoire à Constantin, endormi[2] sous une tente gardée par un valet et quelques soldats, obscurcis par les ténèbres de la nuit ; la lumière qui émane de l’ange éclaire vivement mais sans exagération, la tente, les armures et tous les contours. Dans une autre fresque[3] représentant une bataille, il exprima puissamment l’effroi, l’intrépidité, l’adresse, la vigueur des combattants et les divers sentiments qui peuvent les agiter au milieu d’un carnage effroyable ; Piero mérite de grandes louanges pour avoir rendu par la fresque le brillant des armes dans cette histoire.
Sur l’autre mur[4] est représentée la fuite et la mort de Maxence ; dans cette scène, on remarque un groupe de chevaux en raccourci si merveilleux, qu’ils sont trop beaux et trop parfaits pour l’époque à laquelle ils ont été peints. On y voit, également, un guerrier à demi-nu et à demi-vêtu à la mauresque, monté sur un cheval maigre, remarquable par son anatomie, si peu connue dans ces temps-là.
Piero fut largement récompensé de ce travail par Luigi Bacci, dont il avait introduit le portrait, ainsi que ceux de ses frères et de plusieurs littérateurs arétins, dans une des fresques représentant la décollation d’un roi[5]. Du reste, il fut toujours aimé et révéré à Arezzo, qu’il avait tant illustré par ses ouvrages. Il fit encore, dans l’Evéché[6], une sainte Marie-Madeleine, à fresque, près de la porte de la sacristie, et dans la Compagnia della Nunziata, la bannière que l’on porte dans les processions[7]. À Santa Maria delle Grazie, hors de la ville, il peignit, au commencement d’un cloître, un saint Dominique, entouré d’enfants[8] et assis sur un trône tiré en perspective ; à San Bernardo, couvent des moines de Monte Oliveto, dans une niche placée haut, un saint Vincent qui est très estimé par les hommes de l’art. À Sargiano, couvent