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avec la perfection que l’art demandait et qu’il aurait voulu lui donner ; car les maisons appartenant aux Uberti, gibelins rebelles, ayant été jetées à terre, et la place ayant été rendue nette, la sotte opiniâtreté de quelques-uns fut telle qu’Arnolfo, malgré toutes les raisons qu’il invoqua, n’obtint même pas qu’on lui permît de faire son bâtiment rectangulaire, ceux qui gouvernaient la ville ne voulant d’aucune manière que le palais eût ses fondations sur le terrain en question. Plutôt que de le laisser opérer librement au milieu de la place, ils préférèrent le voir abattre la nef septentrionale de San Pier Scheraggio, outre qu’ils exigèrent qu’il unît au palais et rendît praticable la tour des Foraboschi, appelée la tour della Vacca, haute de cinquante brasses, qu’ils destinaient à renfermer la grosse cloche de la ville, plus quelques maisons achetées par la commune pour cette construction. On ne doit donc pas s’étonner si cet édifice est de travers et hors d’équerre, car il fallut, pour placer la tour au centre, et la rendre plus solide, la bander avec les murailles du palais. Comme Arnolfo fortifia la tour avec de bons matériaux, il fut ensuite facile à d’autres architectes de la surmonter du campanile élevé qu’on y voit actuellement, car en deux ans il ne put achever que le palais auquel, depuis, on a apporté chaque jour toutes ces améliorations qui lui donnent aujourd’hui tant de grandeur et de majesté.

Après avoir accompli ces travaux et beaucoup d’autres aussi utiles que remarquables, ayant atteint l’âge de 70 ans. Arnolfo mourut en 1300[1], dans le même temps que Giovanni Villani commençait à écrire l’histoire universelle de son temps. Non seulement il jeta les fondations de Santa Maria del Fiore, mais encore il banda, pour sa plus grande gloire, trois des principaux arcs qui soutiennent la coupole. Il mérita que son nom passât à la postérité dans une inscription de marbre, placée à l’intérieur de l’église, face au campanile, et qui existe encore.

Dans la fresque de Simone de Sienne, au chapitre de Santa Maria Novella[2], il y a une vue de l’extérieur de la coupole de Santa Maria del Fiore, d’après le modèle original en bois d’Arnolfo. On verra d’après cela qu’il avait l’intention de faire reposer directement la coupole sur les piliers, à la terminaison de la première corniche, tandis que Filippo di Ser Brunellesco, pour la soulager et la rendre

  1. Dans le nécrologe de Santa Reparata, conservé aux archives du Dôme, on lit : VIII idus (martii) Obiit magisler Arnolfus de l’opera di sancta Reparata, MDCC. Il mourut le 8 mars 1300 (style ordinaire 1301).
  2. Fresque droite de la chapelle des Espagnols.