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présence de plusieurs évêques, du clergé, du podestat, des capitaines, des prieurs, des autres magistrats de la ville, enfin de tout le peuple. Il l’appela Santa Maria del Fiore[1]. Comme on prévoyait que la dépense entraînée par cette entreprise serait considérable, on établit, à l’Office de la commune, une taxe de quatre deniers par livre sur toutes les marchandises qui sortiraient de la ville, et un impôt annuel de deux sous par tête. De plus, le pape et le légat accordèrent de très grandes indulgences à ceux qui apporteraient leurs aumônes. Je ne passerai pas sous silence qu’indépendamment des fondations très larges et profondes de quinze brasses, à chaque angle des huit faces du monument, on plaça judicieusement de solides contre-forts qui donnèrent à Brunellesco le courage d’y asseoir la coupole, infiniment plus lourde que celle qu’Arnolfo avait peut-être pensé y édifier. On raconte[2] que, lorsqu’on commença les deux premières portes latérales de marbre, Arnolfo y fit sculpter sur une frise des feuilles de figuier, que l’on prétend avoir été ses armoiries et celles de son père, ce qui engagerait à croire que de lui descendrait la famille des Lapi, actuellement comptant dans la noblesse florentine. D’autres prétendent que Filippo di Ser Brunellesco descendait d’Arnolfo. On dit aussi que les Lapi sont venus de Figaruolo, château situé à l’embouchure du Pô, mais revenons à Arnolfo[3].

Pour la grandeur de cette œuvre, il mérite des louanges infinies et une gloire éternelle, ayant particulièrement fait inscruster de marbre de diverses couleurs tout l’extérieur de l’édifice, jusqu’au moindre recoin. Il avait alors acquis tant de crédit qu’on n’entreprenait plus rien d’important sans recourir à ses conseils. L’an 1284[4], comme on avait terminé les fondations de la dernière enceinte, commencées par la commune de Florence, comme nous l’avons dit plus haut, et que les tours des portes étaient très avancées, il donna le plan du palais des Signori, et en commença la construction, en imitant le palais que Lapo, son père, avait construit, dans le Casentin, pour les comtes de Poppi[5]. Bien que ce plan fût vaste et magnifique, il ne put l’exécuter

  1. Le nom de Santa Reparata ne fut modifié qu’en 1412, par une délibération de la Seigneurie.
  2. Tout ce qui suit n’est que de la fantaisie. Vasari donne ensuite les mesures du Dôme, qui n’ont pas été reproduites, étant inexactes.
  3. II s’agit de la famille des Lapi Ficozzi.
  4. Erreur. Le décret de la commune ordonnant la construction du Palais des Prieurs est du 30 décembre 1298.
  5. Voir une vue ancienne de ce palais, sur une fresque giottesque, représentant l’expulsion du duc d’Athènes en 1844, et conservée au théâtre Verdi, via Ghibellina.