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XVI.


Quoy vous l'avez donc dit ma cruelle Bellonne,
Comme par un desdain que je suis vostre rien :
Vrayment vous m'honorez, & ne sçavez combien,
Car un si grand honneur à chacun ne se donne.

De l'air, de l'eau, du feu, rien jamais ne s'estonne,
Rien n'a ombre ny corps, rien n'a ny mal ny bien,
Rien ne craint la fureur d'un Prince terrien,
Rien n'a peur qu'au besoin le secours l'abandonne.

L'air ne peut l'infecter, l'eau ne peut le dissoudre,
Le feu n'a le pouvoir de le reduire en poudre,
Par nul empeschement son cours n'est arresté :

Tout ou beaucoup ne peut à rien faire dommage,
Mais tous deux une fois luy doivent rendre homage :
Regarde donc l'honneur que tu m'as appresté.


XVII.


Je ne suis point ce Dieu qui plain de follerage,
Poursuivit ta beauté : lors que parmy les prez,
Tu recueillois l'esmail dont ils sont diaprez,
Apres le morne hyver qui leur beauté saccage.

Je ne suis ce soldat qui du Troyen pillage,
Remplit mille vaisseaux dedans Sigee ancrez :
Qui du sang de Priam fit maints glaives pourprez,
Escarlattant les flots du Theucrien rivage.

Je ne suis point encore ce Roy Tenarien,
Qui portant à son flanc le tan Venerien,
Sortit hors des enfers pour ravir Proserpine :

Mal helas je suis bien un Hercule second,
Et toy ma Dianire, ayant dans ta poictrine,
La glace qui me gelle, & le feu qui me font.