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XXVIII.


Quand le Dieu Perruqué ses grands coursiers attelle,
Pour nous darder ses rets plus que l'or reluisans :
Je sens sourdre dans moy mille soupirs cuisans,
Poussez d'un soin rongerd qui tousjours me martelle.

Autant qu'il va haussant sa lumiere immortelle,
Autant mon mal s'avance & consomme mes ans :
Autant qu'il ayde à tout mes maux me sont nuisans,
Et comme il est sans fin, ma peine est eternelle.

S'il eslongne de nous son ardante douleur :
De plus en plus s'accroist mon ardante douleur :
Tellement que le temps se change & non ma peine.

La nuict chasse le jour, le jour chasse la nuict,
Et Phœbus, & Phœbe chacun à son tour luit :
Bref tout est incertain, mais ma peine est certaine.


XXIX.


Nous sommes engendrez des almes deitez,
Nous avons Jupiter & le Ciel pour noz peres,
Nous avons la Nature & la Terre pour meres,
Mais deux astres regnoient à noz nativitez.

Des peres nous tirons noz immortalitez,
Des meres noz travaux & noz peines ameres,
Des astres noz destins & noz desseins contraires,
Qui causent d'un chacun les infœlicitez.

Si le sage mortel peut surmonter son astre,
Ne me pers te perdant par un mesme desastre :
Qui fuit l'amour d'un Dieu au Ciel n'est son tresor.

Les bien-heureux jumeaux par s'aimer toujours vivent,
Fais donc que nos destins & leurs sorts s'entresuivent :
Lors je seray Pollux & tu seras Castor.