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la première moitié du xixe siècle

Nouvelles vont de 1836 à 1852. La crise amoureuse par laquelle il avait passé et qui devait le laisser comme brisé, lui inspira les Nuits : Nuit de Mai, Nuit de Décembre (1835), Nuit d’Août (1836), Nuit d’Octobre (1837), où se révèle avec une maîtrise incroyable le plus grand poète du cœur que nous connaissions. La douleur de l’amant est si forte qu’elle gagne le poète tout entier. Et dans le cri de désespoir qu’il pousse, c’est toute l’âme humaine qui résonne. Jamais peut-être le particulier n’a atteint une si grande force de généralisation. Tous les cœurs sont contenus dans ce cœur… Pourtant cette poésie si essentiellement romantique est classique par plus d’un point, et réussit ce jour de force de concilier deux tendances en apparence inconciliables. Au romantisme il prend le goût de la souffrance, l’amour du moi, le déchaînement de la passion et la grande liberté de la forme ; il en laisse le côté facilement oratoire et demande au contraire classicisme la pureté, la simplicité du sentiment, l’amour de la seule vérité.

Il a laissé, outre d’assez nombreuses nouvelles (Contes et Nouvelles) un théâtre sur lequel il y aurait beaucoup à dire : Les Caprices de Marianne (1833), On ne badine pas avec l’amour, Fantasio (1834), le Chancelier (1835), Il ne faut jurer de rien (1836)… On y sent à la fois l’influence de Marivaux et de Shakespeare, toujours le mélange de la tradition et des apports nouveaux. Les sentiments y sont analysés avec la plus grande délicatesse dans un mouvement rapide, léger, plein d’imprévu et de pittoresque que Mari-