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le xviiie siècle

époque et par sa naissance à aimer la Grèce, s’appliqua à faire entrer ce goût de l’antique dans la poésie. Mais, alors que le xviie siècle, avec Racine, avait cherché dans l’antiquité une littérature abstraite, plus morale que sensuelle et dégagée du détail pittoresque, Chénier, survenant dans un moment où le sentiment était fort en honneur, tira de la Grèce surtout des éléments plastiques et laissa de côté tout ce que Racine y avait apporté d’éléments moraux. On voit ainsi comment ce goût de l’antique qui avait donné naissance au théâtre classique devint, renouvelé par Chénier, la source du romantisme. On a souvent discuté si Chénier était classique ou romantique : à la vérité il est classique en ce qu’il parle de la Grèce et romantique dans sa façon de la concevoir.

Il a écrit encore des élégies dans le goût du xviie siècle qui sont moins intéressantes, et il avait projeté un grand poème l’Hermès, dont il n’a laissé que des fragments. C’est une espèce de De Natura Rerum où il voulait faire entrer toute l’histoire de la Terre. En outre, emporté par le mouvement révolutionnaire, il écrivit des Iambes qui introduisirent dans la poésie française le lyrisme satirique et préparèrent la voie aux Châtiments de Victor Hugo. Son vers est parmi les plus harmonieux, les plus délicieusement musicaux qu’on ait écrits.

Il fut arrêté par le gouvernement de la Terreur et guillotiné.