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cial de la loi de réversibilité dans le monde mécanique, que l’on appelle tantôt la main de Dieu, tantôt la justice immanente, qui veut, comme disent certaines écoles, que chacun récolte ce qu’il a semé, dût, dis-je, un tel acte nous nuire gravement à nous-mêmes, nous n’en continuons pas moins à le commettre, à le laisser commettre, à l’excuser, parfois même à le déclarer beau et louable, pourvu qu’il nuise aux autres et serve nos intérêts.

Bien entendu, nous ne raisonnons pas ainsi tout haut : nous ne formulons pas publiquement des doctrines si directement inspirées par l’égoïsme. Nous nous gardons bien, en général, d’appeler les choses par leur nom comme je viens de le faire. Nous appelons tout cela étendre notre zone d’influence, créer des débouchés de commerce, coloniser, civiliser races inférieures. Et ce sont ces mots qui justifient à nos yeux les moyens que nous employons.

Mon excellent ami, le grand sociologue russe Novicow, qui fera bientôt partie, je l’espère, du Parlement russe, se pose le problème suivant : comment se fait-il que l’homme ait méconnu jusqu’à ce jour ses devoirs et ait professé de telles doctrines ? Eh bien, dit-il, que l’homme s’est trompé, c’est qu’il n’a pas analysé suffisamment les faits sociaux, qu’il a cru que cela pouvait lui procurer plus facilement le bonheur, de tuer, de voler, de détruire ; c’est qu’il n’a pas aperçu la loi de réversibilité. Et Novicow démontre avec le bon sens et la clarté qui caractérisent ses écrits : que la spoliation « est désavantageuse pour le spolié et même pour le spoliateur dont elle diminue la sécurité… ». « Respecter les droits du prochain, continue-t-il, revient en définitive à développer le maximum d’intensité vitale des hommes qui habitent la terre. Par le fait qu’un homme respecte les droits du prochain, il ne fait en dernière analyse qu’exalter ses propres facultés. Ce respect est une autopréservation… Au contraire, l’homme qui viole les droits de ses semblables pousse à une diminution de la vie des autres, donc de la sienne propre ». Tout cela en vertu de ce principe que les êtres collectifs n’ont pas d’existence en dehors des êtres qui les constituent et que la pros-