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Ainsi travesti, ce majestueux mercenaire prend le titre fastueux de maître des cérémonies. En effet, c’est lui qui dirige le cérémonial voulu, l’ordre et la marche ; qui indique aux gens du convoi la manière de s’en servir.

C’est une espèce de garçon d’honneur donnant le branle et menant la mariée.

Comme il porte le haut-de-chausses, ses gras de jambes jouent chez lui un très-grand rôle et sont dans son affaire de première importance.

Un maître des cérémonies complet coûte dix francs ; mais on peut en avoir un sans mollet pour huit. - Un cagneux ne vaut que sept ; et pour trois livres dix sous, autrefois, il y en avait à jambes torses.

Mais, hélas ! l’entreprise des Pompes a fait aussi sa révolution, et chaque jour, ainsi, des détériorations physiques et morales y sont apportées. La décence et le luxe y remplacent de plus en plus et d’une façon désespérante l’antique et primitive simplicité. On y pousse aujourd’hui la folie jusqu’à tresser la crinière et la queue des chevaux comme la blonde chevelure de nos maîtresses, jusqu’à parer leur front d’une cocarde, jusqu’à vernir leurs sabots. En un mot, les morts trouvent maintenant aux Pompes, à toute heure, un excellent confortable ; les vivants les attentions les plus délicates et jusqu’à des habits de deuil tout faits et à louer ; il y a même pour les envois en province des berlines ravissantes, éblouissantes, où le trépassé pourrait au besoin se mirer. La case dans laquelle le défunt se loge est si heureusement dissimulée que j’ai vu plus d’une fois à Longchamps figurer incognito ces élégants équipages. Quand un cocher part pour un transport, soit pour mener ou ramener feu M. de Carabas dans ses terres, soit pour conduire outre-mer quelque baronnet venu chez nous pour apprendre les belles manières, mais mort à la peine, il emporte d’ordinaire avec lui une grande provision de poudre et d’arquebuses, et tout le long de son chemin il fait une guerre terrible. Chaque pièce qui tombe sous ses coups est cachée adroitement dans les profondeurs de la berline, et c’est une chose assez plaisante, au retour du voyage, que de voir déballer cette espèce de bourriche et débarquer, en compagnie de saucissons passés en fraude, une myriade d’écureuils, de bécassines, ou de lapins. Mais, comme il en coûte 10 francs par poste pour faire voyager ainsi les os de ses pères, bien des gens d’ordre et d’économie les mettent tout bonnement au roulage. - Un jour que je me trouvais chez un jeune député de ma connaissance, j’entendis tout à coup s’arrêter un camion à la porte. On sonne, j’ouvre, et l’on me remet un papier. « Qu’est-ce ? » s’écrie notre célèbre représentant. Je dépliai alors le billet et je lus : « La Bastide et Simon frères, commissionnaires-chargeurs à Marseille. - A la garde