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LA MESSE DE PRIMAUT.

couronne. Décidément, je veux chanter la messe. »

Il s’étend sur les dalles, et Renart lui tenant d’une main la tête verse de l’autre l’eau du bassin. Primaut supporte tout sans broncher, et Renart profitant de sa bonne volonté lui élargit la couronne jusqu’aux oreilles. « Ai-je tonsure maintenant ? — Oui, tu peux la sentir toi-même. — Me voilà donc vrai prêtre ! Allons, tout de suite la messe ! commençons. — Mais auparavant, il faut sonner les cloches. — Laisse-moi faire. » Il va aux cloches, saisit les cordes et se met à sonner à glas et à carillon. Renart est pris alors d’une telle envie de rire que la mort de tous ses parents ne la lui auroit pas ôtée. Il se cache comme il peut sous les barbes de son manteau, et lui crie : « Bon ! bon ! plus fort ! toujours plus fort ! Je crois qu’il n’y a pas un clerc, un marguillier capable de mieux sonner. — Mais il faut prendre les deux cordes ensemble, les clochettes ne font pas leur office. — Est-ce mieux comme cela  ? — Oui, oui ; maintenant à l’autel ! Je vais vous aider à passer l’aube et l’aumusse, la ceinture, le fanon et l’étole. » Puis, entre ses dents : « Oh ! comme il chantera tout-à-l’heure autrement ! comme on va lui caresser d’une autre façon les côtes ! »