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LE MONIAGE D’YSENGRIN.

— Attendez au moins que les Frères soient levés de table.

— Les Frères ? il y a des moines chez vous ?

— Assurément, ou plutôt de vrais chanoines ; ceux de l’abbaye de Tyron, enfants de saint Benoit, qui m’ont fait la grâce de me recevoir dans leur ordre.

— Nomenidam ! alors, vous m’hébergerez aujourd’hui, n’est-ce pas ? et vous me donnerez quelque chose à manger  ?

— De tout notre cœur. Mais d’abord répondez. Venez-vous ici en mendiant ?

— Non ; je viens savoir de vos nouvelles. Ouvrez-moi.

— Vous demandez une chose impossible.

— Comment cela ?

— Vous n’êtes pas en état.

— Je suis en état de grand appétit. N’est-ce pas de la viande que je vous vois préparer ?

— Ah ! bel oncle ! vous nous faites injure. Vous savez bien qu’en religion on fait vœu de renoncer à toute œuvre de chair ?

— Et que mangent-ils donc, vos moines ? des fromages mous ?

— Non pas précisément ; mais de gros et gras poissons. Notre père saint Benoit recommande même de choisir toujours les meilleurs.