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CINQUIÈME AVENTURE.

plaisante ? je voulois voir si vous étiez peureuse. Allons ! recommençons ; tenez, me voici les yeux fermés. » La Mésange, que le jeu commençoit à amuser, vole et sautille, mais avec précaution. Renart montrant une seconde fois les dents : « Voyez-vous, » lui dit-elle, « vous n’y réussirez pas ; je me jetterois plutôt dans le feu que dans vos bras. — Mon Dieu ! » dit Renart, « pouvez-vous ainsi trembler au moindre mouvement ! Vous supposez toujours un piége caché : c’etoit bon avant la paix jurée. Allons ! une troisième fois, c’est le vrai compte ; en l’honneur de Sainte Trinité. Je vous le répète ; j’ai promis de vous donner le baiser de paix, je dois le faire, ne seroit-ce que pour mon petit filleul que j’entends chanter sur l’arbre voisin. »

Renart prèche bien sans doute, mais la Mésange fait la sourde oreille et ne quitte plus la branche de chêne. Cependant voici des veneurs et des braconniers, les chiens et les coureurs de damp Abbé, qui s’embatent de leur côté. On entend le son des grailes et des cors, puis tout à coup : le Goupil ! le Goupil ! Renart, à ce cri terrible, oublie la Mésange, serre la queue entre les jambes, pour donner moins de prise à la dent des lévriers. Et la Mésange alors de lui dire : « Renart ! pourquoi donc vous éloigner ? La paix n’est-elle