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RENART ET CHANTECLER.

l’étendue de mon fausset. — Soit, » dit Renart, en reculant à peine, « voyons donc cousin, si vous êtes réellement fils de mon bon oncle Chanteclin. »

Le coq, un œil ouvert l’autre fermé, et toujours un peu sur ses gardes, commence alors un grand air. « Franchement », dit Renart, « cela n’a rien de vraiment remarquable ; mais Chanteclin, ah ! c’étoit lui : quelle différence ! Dès qu’il avoit fermé les yeux, il prolongeoit les traits au point qu’on l’entendoit bien au delà du plessis. Franchement, mon pauvre ami, vous n’en approchez pas. » Ces mots piquèrent assez Chantecler pour lui faire oublier tout, afin de se relever dans l’estime de son cousin : il cligna des yeux, il lança une note qu’il prolongeoit à perte d’haleine, quand l’autre croyant le bon moment venu, s’élance comme une flèche, le saisit au col et se met à la fuite avec sa proie. Pinte qui le suivoit des yeux, pousse alors un cri des plus aigus. « Ah ! Chantecler, je vous l’avois bien dit ; pourquoi ne m’avoir pas crue ! Voilà Renart qui vous emporte. Ah ! pauvre dolente ! Que vais-je devenir, privée de mon époux, de mon seigneur, de tout ce que j’aimois au monde ! »

Cependant au moment où Renart saisissoit le pauvre coq, le jour tomboit, et la