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NOUVELLE ÉTUDE

moyen âge, et je penche à croire que c’est à quelque versificateur latin de la première partie du douzième siècle qu’on en fut redevable. Que ce poëte ait été françois, allemand ou flamand, c’est ce qu’on ne pourra dire avec autorité, tant qu’on n’aura pas retrouvé l’œuvre originale ; mais la première relation de cette guerre en langue vulgaire ayant la forme françoise, il y a bien quelque raison de penser que le modèle latin fut également l’œuvre d’un François.

Maintenant, je dirai qu’on ne peut sérieusement contester le mérite de l’avoir introduite dans le domaine de la poésie vulgaire à la France et au seul de nos trouvères qui en ait réclamé l’honneur. Voici le début du roman :

Seigneurs oï avés maint conte
Que maint conterres vous raconte ;
Coment Paris ravi Heleine,
Les maus qu’il en ot et la peine ;
De Tristan qui la Chievre fist,
Qui assez belement en dist ;
Fabliaus et chansons de geste,
Roman du Lin et de la Beste
Maint autre content par la terre ;
Mais onques n’oïstes la guerre
Qui tant fu dure et grant et fin
Entre Renart et Ysengrin
Qui moult dura et moult fu dure.
Des deus barons, ce est la pure,
Que onc ne s’entr’amerent jour ;
Mainte mellée et maint estour
Ot entre eus deus, ce est la voire.
Dès or comencerai l’istoire
Et de la noise et del content….
Si com je l’ai trové lisant.